MARTINE DE BÉHAGUE : EXTRAIT

Laure/Laure-Marie Stasi, unique Présidente de l'Association de loi 1901 créée par moi en 2014 à la Préfecture de N. ; Bureau en cours de refonte depuis le décès de Mme ma mère Jo. Stasi-Genevois et le départ des autres membres comme VVT , slaure

Extrait :

« Paul Verlaine (1844 1896)
Vint ensuite le soutien à Paul Verlaine (1844 – 1896) ainsi que nous l’avons écrit dès l’année 2000217. Hasard malheureux, Verlaine et Leconte de Lisle se détestaient mais il ne semble pas qu’ils aient été confrontés l’un à l’autre car la comtesse de Béhague ne connut pas personnellement le « Pauvre Lélian » bien qu’elle possédât le chef-d’œuvre absolu de Watteau en matière de dessin qui aurait ravi le poète inspiré par l’artiste pour les Fêtes galantes. Selon tous les témoignages contemporains, le sentiment mélancolique chez Verlaine était également un trait de caractère du grand peintre. La comtesse Martine de Béhague fut son mécène – et non son inspiratrice – mais d’une manière presque impersonnelle puisque c’est par Montesquiou que tout arriva. Le dandy accueillit Verlaine à une époque où ce dernier empestait la prison et le vice ! Verlaine n’était-il pas alors poète et clochard ? Il était très improbable qu’un homme du monde, une personnalité du faubourg Saint-Germain, s’intéressa à Verlaine à cette époque mais le génie avait beau être bohème, minable et malade, c’est lui qui était reconnu par quelques-uns pour son immense talent. Le comte lui permit tout et certains pensent aujourd’hui qu’il voulait être même reconnu comme l’unique bienfaiteur désintéressé du poète. Verlaine critiquait ses œuvres dans ses articles mais Montesquiou, pour une fois, ne semble pas lui en avoir voulu, bien au contraire. Il lui consacra des pages admiratives dans Autels privilégiés (1899) et dans ses mémoires éditées en 1921 sous le titre Les pas effacés. Verlaine reprochait à Montesquiou une verve excessive mais il rédigea pourtant un poème amical dédicacé au comte Robert de Montesquiou-Fezensac dans lequel il fit allusion aux Chauves-souris du comte. De nombreuses lettres – 68 au total – de Verlaine à Montesquiou et Gabriel Yturri (1860 – 1905), son secrétaire et ami, sont répertoriées. Leurs relations étaient donc suivies. Montesquiou fit connaître le poète à quelques personnalités comme Gabriel Fauré auquel il le révéla très tôt. Surtout, grâce à son intermédiaire, Verlaine hospitalisé à Broussais reçut un argent qui lui était alors devenu un bien très nécessaire ! Pour cela Montesquiou avait formé un comité de soutien à Verlaine en 1894 et, connaissant très certainement ses goûts littéraires, il demanda à Martine de Béhague d’y prendre part. Elle peut être donc comptée à présent parmi les mécènes de Verlaine. Le département des Manuscrits de la Bibliothèque nationale de France conserve quelques lettres de la comtesse à Montesquiou. Elle accepta d’endosser le rôle de mécène littéraire avec quelques autres avant sa brouille avec le dandy et poète :

« Il n’y a nulle indiscrétion cher Monsieur, à parler de belles et bonnes choses à quelqu’un qui les aime et sera heureuse d’y contribuer pour sa minime part. / de Mr Verlaine je ne connais que le talent et si le sort ne lui est pas heureux je me joins volontiers à ceux qui le tireront d’un état pénible. »

Les papiers Montesquiou – également inédits – concernant Verlaine apportent d’autres renseignements quant à ces donateurs de la bonne société parisienne. Ce comité était resté très discret jusqu’à aujourd’hui. Cette idée était en réalité celle de l’écrivain et homme politique Maurice Barrès (1862 – 1923) qui s’était adressé à Robert de Montesquiou pour lui proposer de former un comité de quinze personnes, versant chacune dix francs par mois, ceci afin de permettre d’assurer une pension à Paul Verlaine. Dans une lettre du 23 août 1894 au poète, le comte Robert de Montesquiou donna la liste de ces quinze justes : la comtesse Greffulhe, la duchesse de Rohan, l’écrivain Henry Bauër (1851 – 1915), l’écrivain Paul Brulat (1866 – 1940), le poète et dramaturge François Coppée (1842 – 1908), l’écrivain Léon Daudet (1867 – 1942), le docteur L. Jullien, l’écrivain et critique dramatique Jules Lemaître (1853 – 1914), l’éditeur en chef du Figaro Francis Magnard (1837 – 1894), l’écrivain et critique d’art Octave Mirbeau (1848 – 1917), le poète et écrivain Jean Richepin (1849 – 1926), le poète et Prix Nobel de littérature Sully-Prudhomme (1839 – 1907), Montesquiou, Maurice Barrès et enfin la comtesse René de Béarn c’est-à-dire Martine de Béhague. Les Amis de Verlaine furent constitués de plus de 150 personnalités mondaines en 1930 ! On remarquera qu’en 1894 la majorité des donateurs était constituée d’hommes de lettres et que seules trois dames de la haute société furent appelées dont la plus belle femme de Paris, la célèbre Elisabeth Greffulhe, nièce de Montesquiou, qui ne fut pas effrayée par le scandaleux poète. Toute aussi familière qu’Elisabeth des traits de génie de Verlaine, la comtesse Martine, elle, était réputée moins jolie selon le dandy qui se moquait mais elle avait d’autres forces ! Un soir où la danseuse Ida Rubinstein était invitée à l’hôtel de Béhague, parée de plumes multicolores et certaine d’être la plus belle, la comtesse, pleine d’esprit et d’humour, apparut à son tour en tenue de marin avec un splendide collier de marrons d’Inde ! Au sujet du soutien de Verlaine, Martine de Béhague avait déjà certainement su se faire connaître pour sa générosité et son excellente sensibilité à la plume des poètes comme Desbordes-Valmore (1786 – 1859) qu’elle lut ou Leconte de Lisle (1818 – 1894) auquel elle prêta beaucoup d’argent ! Chacun des membres du comité s’était engagé à verser l’argent qui serait tenu à la disposition du poète dès le mois de septembre 1894. Le Figaro se chargeait de la comptabilité mais la pension ne fut pas toujours régulièrement versée. Montesquiou eut un dernier geste pour son ami. Pauvre Lélian, son célèbre poème titré au moyen de cette anagramme du prénom et du nom de Verlaine, fut publié le jour de l’enterrement du poète qui s’éteignit le 8 janvier 1896. Bien plus tard, la musicienne amateur tenant un célèbre salon boulevard Malesherbes, Marguerite de Saint-Marceaux (1850 – 1930), se souvint que le 8 juin 1910 eut lieu une conférence sur Verlaine donnée par Beaunier (1869 – 1925) à la galerie Georges Petit où se trou- vaient appendues de « vilaines peintures de Madeleine Lemaire » (de son vrai nom Jeanne Magdelaine Colle, (1845 – 1928). On y remarqua, fidèle à sa passion, la comtesse de Béhague218.  »

Date de dernière mise à jour : 15/11/2024

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